En 2024, les associations françaises sont confrontées à un défi de taille : assurer leur pérennité financière dans un contexte économique instable et concurrentiel. Avec la diminution des subventions publiques et la concurrence accrue pour les dons privés, les « assos » doivent se réinventer et adopter des stratégies innovantes pour diversifier leurs sources de revenus.
Selon une récente étude du Conseil économique, social et environnemental (CESE), 91% des associations considèrent que le temps consacré à la recherche de financements est une difficulté majeure. De plus, 90% peinent à financer leur fonctionnement et 89% leurs projets à long terme. Cette quête incessante de fonds met à rude épreuve les ressources humaines et financières déjà limitées de nombreuses structures.
Diversifier pour survivre
Face à ces défis, les associations n’ont d’autre choix que de multiplier les pistes pour diversifier leurs sources de revenus. Parmi les stratégies les plus populaires, on retrouve :
· Le mécénat et la collecte de dons
Avec 69,9% des associations qui y ont recours, le développement du mécénat et de la collecte de dons reste l’une des principales sources de financement. Cependant, cette voie nécessite des efforts soutenus en termes de communication et de relations publiques pour sensibiliser et fidéliser les donateurs.
Prenons l’exemple de l’association Les Restos du Cœur, qui a su mobiliser des millions de donateurs grâce à des campagnes de communication percutantes et à l’implication de personnalités publiques. L’année dernière, elle a récolté plus de 120 millions d’euros de dons, soit près de 60% de ses ressources annuelles.
· L’augmentation des cotisations
Environ 30% des associations choisissent d’augmenter leurs cotisations pour compenser la baisse des subventions. Néanmoins, cette solution comporte des risques, notamment celui de perdre des adhérents qui ne peuvent ou ne veulent pas payer davantage.
C’est le cas de la Fédération Française de Randonnée Pédestre, qui a dû augmenter ses cotisations de 10% en 2023 pour faire face à la hausse de ses coûts de fonctionnement. Malgré des grognements de certains adhérents, cette décision s’est avérée nécessaire pour maintenir la qualité des services proposés.
· Les activités lucratives accessoires
Le lancement d’activités lucratives accessoires, comme la vente de biens ou de services, est une option intéressante pour générer des revenus complémentaires. Cependant, ces activités doivent rester en adéquation avec les valeurs et les objectifs de l’association.
L’association Emmaüs, par exemple, tire une partie de ses revenus de la vente d’objets de seconde main dans ses boutiques solidaires. Cette activité commerciale lui permet de financer ses actions d’aide aux personnes démunies, tout en promouvant une consommation plus responsable.
· Le crowdfunding
Le financement participatif, ou crowdfunding, constitue également une piste prometteuse pour les associations en quête de fonds. En faisant appel à la générosité du grand public via des plateformes en ligne, elles peuvent rapidement récolter des fonds tout en gagnant en visibilité. Néanmoins, cette approche requiert une stratégie de communication efficace et une capacité à mobiliser sa communauté.
C’est ce qu’a réussi à faire l’association Les Petits Frères des Pauvres, qui a lancé une campagne de crowdfunding pour financer son programme d’accompagnement des personnes âgées isolées. Grâce à une vidéo émouvante et à une mobilisation massive sur les réseaux sociaux, elle a dépassé son objectif de collecte en seulement quelques semaines.
Innover pour prospérer
Bien que ces solutions traditionnelles soient utiles, elles ne suffiront pas à elles seules à combler les besoins croissants des associations. C’est pourquoi l’innovation devient un impératif pour assurer leur survie et leur prospérité à long terme.
De nouveaux modèles économiques
Certaines structures explorent ainsi de nouveaux modèles économiques, comme le développement d’activités commerciales complémentaires ou la création de filiales lucratives. Cette approche permet de générer des revenus tout en conservant l’essence non lucrative de l’association.
Cependant, il est essentiel de bien étudier la faisabilité et la rentabilité de ces activités avant de se lancer, afin d’éviter tout risque financier ou juridique.
L’association Handicap International, par exemple, a créé une filiale commerciale qui propose des services de conseil et de formation aux entreprises sur l’inclusion des personnes en situation de handicap. Cette activité lucrative lui permet de dégager des bénéfices réinvestis dans ses programmes d’aide aux personnes handicapées dans les pays en développement.
Le numérique, un allié de poids
D’autres associations misent sur le numérique en proposant des services en ligne ou en tirant parti des nouvelles technologies pour optimiser leurs opérations. Par exemple, certaines ont développé des applications mobiles pour faciliter les dons ou la gestion des adhésions.
Le numérique offre également de nouvelles opportunités de communication et de sensibilisation, grâce aux réseaux sociaux et aux campagnes de marketing en ligne.
C’est le cas de l’association WWF France, qui a lancé une campagne de financement participatif sur les réseaux sociaux pour sauver les derniers rhinocéros de Java. Grâce à des vidéos virales et à une mobilisation massive de sa communauté en ligne, elle a réussi à récolter plus d’un million d’euros en quelques semaines.
Les partenariats, une solution gagnante
Les partenariats public-privé et les collaborations intersectorielles représentent également des pistes intéressantes pour accéder à de nouvelles sources de financement et partager les coûts. En s’associant avec des entreprises ou d’autres organisations, les associations peuvent bénéficier de ressources supplémentaires et d’une plus grande visibilité.
Cependant, il est crucial de choisir ses partenaires avec soin et de s’assurer que leurs valeurs et leurs objectifs sont compatibles avec ceux de l’association.
L’association Médecins Sans Frontières (MSF) a noué un partenariat gagnant-gagnant avec l’entreprise de cosmétiques L’Oréal. Cette dernière reverse une partie des bénéfices de sa gamme de produits solidaires à MSF, qui peut ainsi financer ses missions humanitaires d’urgence. En contrepartie, L’Oréal bénéficie de l’image positive et engagée de MSF.
Conclusion
En cette année 2024 charnière, les associations françaises doivent faire preuve d’agilité et d’audace pour réinventer leurs modèles économiques. Qu’il s’agisse d’exploiter de nouveaux créneaux, de nouer des partenariats inédits ou d’adopter des technologies de rupture, l’innovation sera la clé de leur pérennité.
Celles qui sauront se réinventer et diversifier leurs sources de revenus survivront et prospéreront, tandis que les autres risquent de disparaître, faute de moyens. C’est un défi de taille, mais les associations qui relèveront ce défi avec créativité et détermination auront toutes les chances de poursuivre leur mission essentielle au service de la société.